Cycle de films
NOIR & BLANC // HOMMAGE À BRUNO GANZ
Le noir et blanc, la meilleure couleur ? Le printemps débute au Filmpodium de Bienne avec une magnifique sélection des derniers films en noir et blanc et rendra hommage à Bruno Ganz, acteur talentueux et rare.
Est-ce un hasard que deux des films les plus forts de l’année, « ROMA » d’Alfonso Cuarón et « COLD WAR » de Pawel Pawlikowski, aient été tournés en noir et blanc ? Alors que Cuarón, qui officiait lui-même aussi comme caméraman, exploitait jusque dans les dernières nuances les 256 tons de gris existants dans son drame mettant en scène une employée de maison dans la capitale du Mexique de 1971, le caméraman de Pawel Pawlikowski, Lukas Zal – qui était déjà de la partie dans le film précédent « IDA » – réussissait de manière géniale à évoquer les années 1949 et 1964 à l’aide d’images à caractère plus monochrome. Ce régisseur explique que s’il a une une nouvelle fois décidé de renoncer à la couleur, c’est parce que la Pologne de l’époque évoquait pour lui des souvenirs tout sauf multicolores. Ces deux dernières années, au-delà de « Roma » et de « Cold War », toute une série d’autres films magnifiques ont été produits en noir et blanc, qui dans les prochaines cinq semaines peuvent être admirés sur grand écran au Filmpodium Bienne.
Ce n’est peut-être pas un hasard si Bruno Ganz, décédé le 16 février dernier, apparaît également en noir et blanc dans deux de ses derniers films, interprétant deux rôles qui montrent de manière impressionnante les facettes si différentes de cet acteur d’exception né en Suisse en 1941. Alors que dans « THE PARTY », le film intime comique de Sally Potter, il exploite son potentiel humoristique dans son rôle hilarant de guérisseur, il représente dans « FORTUNA », drame de Germinal Roaux impliquant des réfugiés, un personnage socialement engagé qui, dans sa spiritualité, apparaît déjà presque comme déconnecté du monde actuel. Trois décennies auparavant, il était déjà totalement éloigné de ce monde en jouant un ange dans le conte magistral de Wim Wenders, « LES AILES DU DÉSIR ». Wenders s’était adjoint les services du caméraman Henri Alekan, qui alterne ici entre le noir et blanc et la couleur (noir et blanc dans le ciel, en couleur sur terre), et qui était devenu mondialement célèbre en collaborant avec Jean Cocteau, René Clément et William Wyler. Né en 1909, Alekan avait déjà pris sa retraite lorsque Wenders l’avait sollicité. Avec « Les Ailes du désir », il signait ainsi sa dernière œuvre, qui représente aujourd'hui l’héritage de deux artistes du siècle.